gŽologie du Haut-Jura

Les formes caractéristiques du relief jurassien

Elles appartiennent à cette catégorie des grandes architectures topographiques définies par les relations qu'elles entretiennent avec la structure plissée de la région. Suivant l'importance de la dégradation par l'érosion on distingue trois catégories de formes.

Les reliefs liés au plissement

Ce sont les monts et les vaux. Le mont est un chaînon qui correspond rigoureusement à une structure anticlinale : en théorie les versants sont formés par l'affleurement de la couche qui termine la série sédimentaire plissée. Mais le plus souvent l'érosion a enlevé une partie des couches sommitales, surtout si celles-ci sont constituées d'un matériel peu résistant.
Une dépression allongée correspondant à une structure synclinale est appelée val. Le fond est formé par les dernières couches de la série sédimentaire plissée : leur position basse les a généralement préservées de l'érosion, mais ce n'est pas toujours le cas.
Dans le détail, monts et vaux ont des formes très variées qui reflètent la diversité des dispositions tectoniques. Ainsi dans le cas de structures chevauchantes, un escarpement de chevauchement sépare un demi-mont d'un demi-val.

Les marques de l'érosion

Les gouttières synclinales sont des axes privilégiés pour l'installation du réseau hydrographique. Pourtant les principales artères de drainage échappent bien souvent à cette sollicitation et recoupent perpendiculaire-ment les structures plissées. Une cluse est une gorge par laquelle une rivière traverse un mont ou une succession de monts et de vaux.
L'inadaptation du tracé de la rivière par rapport à l'organisation générale de la topographie s'explique par des phénomènes d'antécédence et de surimposition.

Les combes sont des dépressions creusées par l'érosion, au sommet d'un anticlinal. Elles s'étirent suivant l'axe du pli et se développent dans des roches tendres. Les couches dures qui constituent l'enveloppe de I'anticlinal ont été enlevées au sommet du mont, mais forment de part et d'autre de la combe des crêts qui la surplombent parfois de façon vlgoureuse.
Le creusement de combes dans un système de plis parallèles peut conduire à une véritable inversion du relief par rapport aux données de la tectonique. Le fond des synclinaux protégé par leur carapace calcaire domine alors les anticlinaux profondément évidés. On parle alors de vals ou de synclinaux perchés.
Le dégagement des combes dans l'axe des anticlinaux peut conduire à la formation d'un mont dérivé dans les couches calcaires sous-jacentes débarrassées de leur enveloppe marneuse.

Le travail exclusif de l'érosion : des plateaux en structure plissée

A terme, le travail de l'érosion tend à niveler totalement les reliefs mis en place par les mouvements tectoniques. Une topographie de surface d'érosion tranche alors indifféremment les structures géologiques héritées des phases de plissements. Que surviennent alors de nouvelles déformations, l'érosion reprend en exploitant les différences de dureté des roches et crée des formes plus complexes.

LES AUTRES FORMES DU RELIEF REGIONAL

Il s'agit de formes mineures qui s'impriment à l'intérieur des grandes architectures topographiques. Dans la plupart des cas, leur modelé est lié à l'action érosive de l'eau. De dimensions souvent modestes, ces sites sont particulièrement attractifs par leur beauté sauvage ou insolite.
Bien que très conditionnées par la structure plissée, ces formes ne lui sont pas directement liées et caractérisent moins le relief dit " jurassien ". Pourtant, par leur abondance et leur diversité, elles confèrent à la région du Parc une grande partie de son originalité.
L'importance de la karstification limite les écoulements superficiels à quelques rares rivières : Bienne, Tacon, Flumen. L'érosion fluviale, aidée localement par les glaciers, a sculpté des vallées aux formes variées. Par des cascades ou des gorges étroites, les rivières franchissent les bancs d e roches dures, alors que des plaines alluviales prennent de l'ampleur là où affleurent les roches plus tendres.
La gélifraction trouve sur les falaises rocheuses un lieu de prédilection de son action. Les débris tombent sous l'effet de la gravité et la roche toujours à nu est sans cesse soumise à ces attaques. La superpo-sition de bancs rocheux de nature différente conduit souvent à un modelé en marches d'escalier et en abris sous roche, appelés également baumes ou balmes. Les roches très gélives s'excavent rapidement et sont dominées par des surplombs qui, mis en porte-à-faux, se fissurent et finissent par s'ébouler.
Sous le double effet de la gélifraction et de la gravité, la falaise recule peu à peu, parallèlement à elle-même. A ses pieds les débris fins issus de la gélifraction, mais aussi les gros blocs éboulés s'accumulent et forment un talus d'éboulis qui fossilise la base de la falaise. Aujourd'hui ces processus, quoique très atténués, sont encore fonctionnels sur la plupart des corniches rocheuses de la région.
Mais compte tenu de l'abondance des roches calcaires dans la région, ce sont surtout les formes karstiques qui retiennent l'attention. Elles se classent en deux grandes familles : modelés de surface et réseaux souterrains.

Les modelés de surface

Les lapiaz sont des formes superficielles de dissolution de la dalle calcaire : l'érosion exploite au maximum les fissures, la roche est lacérée par un réseau de rainures et cannelures plus ou moins profondes et sculptée en blocs massifs ou en crêtes acérées.
Les dolines (ou " empossieux ") sont des dépressions fermées de quelques mètres ou quelques dizaines de mètres de diamètre dont le fond est généralement tapissé par des argiles résiduelles.
Les avens sont des dolines qui s'ouvrent sur un gouffre souterrain.
Les ouvalas sont de vastes dépressions fermées résultant de la coalescence de plusieurs dolines.
L'accroissement de la perméabilité de la dalle calcaire par élargissement des fissures conduit souvent à une désorganisation du réseau hydro-graphique superficiel. Des infiltrations plus ou moins importantes (pertes) ponctionnent tout ou partie du débit des cours d'eau. Ainsi, une vallée sèche est une forme fossile liée à la disparition, par soutirage karstique, du ruisseau responsable de son façonnement.

Les formes souterraines

Dans la masse du calcaire, les eaux d'infiltration poursuivent leur travail de dissolution le long des axes de fracturation (diaclases, fissures, failles) et des plans de stratification de la roche.
Ainsi se créent des réseaux de galeries souterraines de dimensions variables et reliées entre elles par des puits et des gouffres.
Les eaux se rassemblent dans les galeries profondes lorsque la pro-gression des infiltrations est bloquée par la présence de couches marneuses imperméables : après des cheminements parfois complexes, elles aboutissent à de grosses sources ou émergences karstiques situées dans les vallées les plus encaissées. Les galeries supérieures sont en général des formes fossiles : autrefois parcourues par des écoulements, elles ont été asséchées par l'ouverture progressive des galeries inférieures.
La complexité de l'hydrologie karstique est à l'image de celle des réseaux souterrains. Il est impossible de prévoir la vitesse et la direction des écoulements dans les structures géologiques. Pour savoir avec exactitude où ressortent les eaux d'une perte, il faut avoir recours à des métho-des de coloration.
De tels procédés permettent de dresser les cartes des circulations karstiques et de mieux connaître les ressources en eau souterraines, mais aussi de dépister d'éventuels foyers de pollution des sources.
Cette présentation des principaux éléments de la morphologie jurassienne n'épuise pas le sujet tant est grande la diversité du milieu naturel. Les schémas théoriques, pour avoir valeur générale, sont nécessairement simplificateurs. La découverte des paysages et sites les plus originaux . de la région du Parc Naturel Régional du Haut-Jura montre bien que la réalité est autrement plus complexe et toute en nuances.